samedi 1 juin 2013

~~ NEMRUT DAGI : L'Histoire d'un Roi ~~



L'histoire du Mont NEMRUT DAGI au centre-sud de l'actuelle Turquie, est liée à celle d'ANTIOCHOS 1er, roi du petit Royaume de Commagène...





Sur les premières pentes du Mont NEMRUT DAGI, la riche histoire du lieu s'écrit dans la pierre... Sur les ruines de l'ancienne ARSAMEIA, ce bas-relief de style hellénistique représente le roi ANTIOCHOS 1er serrant la main d'Héraclès. Ce vestige monobloc en calcaire mesure 3m30 de hauteur pour une largeur de 1m80. Héraclès (Hercule), demi-dieu fils de Zeus et d'Acmène, symbolise bien sûr la force et la bravoure. Espérons qu'il n'ait pas broyé ce jour-là la main du roi de Commagène...



ARSAMEIA, sur les premières pentes du Mont NEMRUT DAGI, est l'ancienne capitale du Royaume de Commagène. Sur ce bloc de calcaire sont gravées des inscriptions de culte de Mithridates 1er (père d'ANTIOCHOS 1er) qui comprit en son temps (90 avant Jésus-Christ) que pour tenir tête à Rome, il fallait disposer d'alliés puissants. Il se tourna alors vers Tigrane, roi d'Arménie.






Héraclès (détail du bas-relief monumental)






C'est Karl Dörner qui mit au jour ARSAMEIA en 1951 avec la découverte d'inscriptions grecques dans lesquelles ANTIOCHOS 1er retraçait déjà l'histoire de sa ville : son ancêtre Arsamès fonda Arsameia au 2ème siècle avant Jésus-Christ et il en fit sa résidence d'été. En 80 avant Jésus-Christ, Mithridates 1er, père d'ANTIOCHOS 1er, y fit construire sa tombe monumentale. 23 siècles après la création d'Arsameia, Karine explore malicieusement les vestiges de la ville dans la lumière du premier jour de juin 2013....






ANTIOCHOS 1er, roi de Commagène
(détail du bas-relief monumental)





En contrebas du Mont NEMNRUT DAGI, cette rivière paisible est un affluent de l'Euphrate qui deviendra plus loin fleuve bordé par les rives de Mésopotamie (l'IRAK d'aujourd'hui) avant de se jeter du côté de Basra dans les eaux tièdes du Golfe Persique.






La poignée de main d'Héraclès au roi de Commagène. Les séquelles visibles sur cette image ne sont bien sûr que les dégâts du temps...





Aujourd'hui, on accède en voiture au pied du site par une route goudronnée ou pavée correcte mais extrêmement pentue. Nous avons été bien inspirés de laisser notre attelage-maggiolina au camping-Pansyon-Karadut à une douzaine de kilomètres en contrebas. Sans la remorque, les deux roues motrices de notre petit Peugeot-Partner malin ont déjoué toutes les difficultés du parcours. Quoique il en soit, et fort heureusement, les derniers hectomètres s'effectuent à pied impérativement, cela contribue à préserver quelque peu la sacralité de ce site archéologique unique et à durcir conséquemment nos mollets. Ici, Karine marche en bordure du tumulus de 150 mètres de diamètre et 50 mètres de hauteur édifié par ANTIOCHOS 1er. Ainsi, le roi de Commagène était rassuré de pouvoir dominer d'autant, de son sommeil éternel, tous les Monts Ankar alentours, à l'est de la chaîne des Taurus... 






""Moi, ANTIOCHOS 1er, j'ai ordonné l'édification de ces temples sur des bases qui ne seront jamais détruites, à l'abri des ravages du temps près des trônes célestes des dieux tout puissants où mon âme divine reposera pour l'éternité afin de témoigner de ma piété. J'ai fait ériger de telle sorte qu'elles soient dignes des dieux les statues de Oromasdes, Mithras, Héraclès et celle de ma Patrie, ma Commagène nourricière. Juste à côté des dieux qui écoutent nos prières, taillée dans la même pierre, j'ai fait ériger ma propre statue qui me représente assis trônant. A la fin de ma vie, j'entrerai ici-même dans mon repos éternel et mon esprit rejoindra celui d'Oromasdes (Zeus)""






Nous voilà contournant à la force du mollet cet imposant tumulus de pierres, dessein du roi de Commagène. La réalisation de cet édifice unique dura 27 ans de 96 à 69 avant Jésus-Christ, nous laissant imager la somme de travail pour acheminer plus de 30.000 mètres cubes de pierres jusqu'au sommet de la montagne dans cette régions aux hivers rudes. Le Nemrut Dagi s'en trouva grandi de 50 mètres, culminant ainsi aujourd'hui à 2150 mètres.



























A l'origine, les statues monumentales du site funéraire d'ANTIOCHOS 1er mesuraient 8 à 10 mètres. Elles représentaient pour la plupart des dieux grecs. Saccagées et décapitées par les romains, leurs têtes se trouvent aujourd'hui à même le sol en contre-bas des bustes... L'Aigle, seigneur du ciel et messager des dieux, et le Lion, gardien et protecteur du royaume des dieux, ont aussi leur représentation près des divinités.













L'histoire récente raconte que le tumulus avait une hauteur originelle de 75 mètres. Dans les années 50, on prête à une mission archéologique à la recherche du tombeau d'ANTIOCHOS 1er, sous la houlette de Teresa Goell, d'avoir utilisé la dynamite à la cime du tumulus, amputant ce sommet artificiel du 1/3 de sa hauteur. Difficile d'imaginer que pareille méthode ait pu être employée par Teresa Goell, amoureuse du Nemrut Dagi et qui lui consacra les 30 dernières années de sa vie jusqu'à sa mort en 1985. Quoique il en soit, le tombeau du roi de Commagène aurait été localisé précisément au coeur du tumulus sans avoir jamais été mis au jour. Et près de 2050 ans après sa mort, ANTIOCHOS 1er peut poursuivre ainsi son sommeil éternel tel qu'il l'avait rêvé : ""Dans ce temple édifié sur des bases indestructibles, à la fin de ma vie, j'entrerai ici même dans mon repos éternel et mon esprit rejoindra celui d'Oromasdes...""




















Au loin, en contrebas du Nemrut Dagi, un lac de barrage sur l'Euphrate. Nous le franchirons demain à bord d'un vieux ferry. Toujours cap à l'Est, nous quitterons l'Anatolie pour découvrir le Kurdistan...


































Nous redescendons du sommet du Nemrut Dagi... Nous redescendons sur terre tout simplement après avoir salué là-haut si près des dieux le souvenir d'ANTIOCHOS 1er, roi souvent controversé du petit royaume de Commagène, pris en étau entre deux grands empires, romain à l'ouest, perse à l'est, qu'il rêvait secrètement d'unir sous sa houlette...







Sur les premiers bas-flancs de la montagne sacrée, nous saluons une dernière fois les vestiges d'Arsameia, "la ville nourricière" du roi de Commagène. L'histoire ne le dit pas, mais tout laisse penser que ses habitants furent durant 27 années du dernier siècle avant l'ère chrétienne les ouvriers de la sépulture de leur roi, si près des dieux, tout là-haut au sommet du Nemrut Dagi.






Avant d'atteindre la vallée, non loin d'Arsameia, nous longeons les vestiges de Yeni Kale, littéralement "la Forteresse Nouvelle"...








Difficile de s'arracher à l'ultime royaume d'ANTIOCHOS 1er, celui du tout dernier sommeil. Le roi de Commagène fut souvent taxé de mégalomanie. Il est bon de se replacer dans le contexte de cette époque où les hommes vivaient si près des dieux. Et l'Histoire souvent imprécise, se plaît à habiller à sa guise ses acteurs d'ombre ou de lumière. Comment ne pas avoir de l'affection pour ce roi, simple mortel comme vous et moi, persuadé d'une immortalité qu'il s'est bâti tout là-haut sur les sommets du Nemrut Dagi? Demain, nous franchirons un lac de barrage sur l'Euphrate, cap sur le Kurdistan, si tout le monde reste sage comme il se doit, et comme Maggy du côté du Quebec, Michèle du côté de La Chaume, Marianne du côté de Bussiny, Anne du côté de Meylan, Nadine du côté de Bradenton, Régine du côté d'Ancenis ou Micky du côté de la Bretagne. Belle nuit à tous les passagers du blog des artistes, des poètes et des voyageurs.

""J'avais cette sensation que le monde m'était confié, et ce n'était pas de la mégalomanie, mais bien au contraire de l'humilité. Je pressentais que chacun d'entre nous a, à son échelle, la charge du monde. Par le désordre, j'entraîne le désordre autour de moi. Si au contraire, j'entre dans l'ordonnance intérieure de l'amour, je rayonne..."" (Christiane SINGER)





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